Le 28 septembre, lors du discours de clôture des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie, Emmanuel Macron a annoncé un remboursement des séances chez le psychologue à compter de 2022.
Alors, j’ai tellement de choses à dire que je vais prendre le temps de digérer avant de m’aventurer dans de longues explications pour vous permettre de saisir (si jamais ça n’est pas déjà le cas) à quel point cette annonce est maltraitante tant pour les patients que pour les psychologues. Mais je l’accorde, de loin (très très loin), ça a l’air joli.
Sachez chers patients que je n’adhérerai évidemment pas à ce dispositif de conventionnement, que l’on pourrait aussi appeler dispositif de mise sous tutelle médicale et précarisation de toute une profession, ou encore dispositif de mise à mort programmée. Compte tenu de la faible adhésion des psychologues lors des expérimentations dans quelques départements français, on peut imaginer (et espérer fortement) qu’il en sera de même pour ce dispositif.
Est-ce que l’on parle de la mécanique économique qui sous-tend tout cela, des enjeux électoraux, des effets d’annonce, du déni total des compétences d’une profession, de la division à tous les niveaux pour mieux régner, du fait qu’aucune instance de psychologues n’a été seulement consulté, du ton méprisant de Macron hier (je pense que depuis l’espace on pouvait voir son rictus condescendant en évoquant les psychologues), de l’infantilisation des patients, de l’irrespect total quant à la singularité des êtres humains, de l’industrialisation et de la désindividualisation du soin psychique, de la suppression de la liberté d’exercice de professionnels formés à minima bac+5, etc?
Non, n’en parlons pas, je l’ai écris plus haut, je vais digérer d’abord.
Pour vous, patients, voici quelques données qui vous permettront de comprendre le refus massif des psychologues d’une telle ubérisation de la santé mentale en France :
– sur prescription médicale uniquement.
Une mise sous tutelle par des médecins qui n’ont pas de connaissances et de compétences en matière de psychologie, psychopathologie, etc. L’obligation pour le patient d’exposer son état à différents interlocuteurs.
Et j’en passe.
– limité à 8 séances, renouvelable une fois, après avis d’un psychiatre et à nouveau prescription du médecin.
Vous voyez la scène de la maison qui rend fou dans les 12 travaux d’Asterix?
Et j’en passe.
– une tarification de 40 euros la première séance puis 30 euros.
Sachant qu’une consultation dure environ 1h et coûte en moyenne en France 50 à 60 euros et que le psychologue exerçant en libéral a environ 60% de charges (sans compter les coûts de formation continue par exemple, ou encore de supervision), je vous laisse faire le calcul… En somme, un psy à temps plein pourra espérer toucher le SMIC, en criant « au suivant » toutes les 30 minutes.
Et j’en passe.
Je vais donc continuer à travailler dans les conditions actuelles, avec déontologie, respect des patients et de moi-même.
Chapeau bas madame de vous respecter et de respecter vos patients (es) en vous mettant debout: en refusant cette aumône !
Ceci honore votre Humanité …
Nelly CADRA